Migrer, migrations, un défi pour l’Europe
SAVOIR ACCUEILLIR À CLUNY
Depuis le début de mon mandat en 2020, l’accueil de personnes réfugiées s’est intensifié, suite à la guerre en Ukraine. Les Clunisois se sont mobilisés en allant en Slovaquie au-devant des personnes fuyant leur pays dès février 2022, et en cherchant des solutions pour accueillir au mieux les familles ukrainiennes. Les dons collectés par l’association Cluny de la paix ont été nombreux, en objets et en numéraire. Heureusement, la tradition d’accueil à Cluny ne date pas d’hier, et le réseau social et solidaire, les associations et les collectivités ont l’habitude de travailler main dans la main.
Sur Cluny, nous avons au niveau de la ville, fait ce que nous pouvions, dans notre champ de compétence, avec nos moyens pour aider : en prêtant des salles pour les cours de français langue étrangère (FLE), en mettant à disposition des logements de notre résidence Benetin, en intervenant au titre du CCAS sur les aides pour les centres de loisirs, la cantine à 1 euro…
Comme pour d’autres arrivants, l’école est un facteur d’intégration important, et nous avons la chance de pouvoir bénéficier d’enseignement pour les enfants allophones : à nous aussi de prévoir à la médiathèque des livres pour ces petits qui ne parlent pas français…
Cette tradition d’accueil, de havre de paix, voulue dès la création de l’abbaye au Xe siècle est marquée par des actes forts comme celui de Pierre le Vénérable offrant l’hospitalité à Abélard, ou l’institution du ban sacré, où chacun devait déposer les armes. Aujourd’hui, il ne tient qu’à nous de la faire perdurer. Et cela, pour le bien de tous, car cette ouverture sur le monde, permise grâce aux nouveaux arrivants, est une richesse pour notre territoire.
Marie Fauvet, Maire de CLuny
Partir, bouger, sortir de chez soi, changer son regard, se mettre en mouvement : migrer, c’est à cela que nous invite l’Europe dont nous allons renouveler le parlement le 9 juin.
Ceux qui s’exilent, quittent leur « chez soi », démunis, se mettent en mouvement, paient cher le prix de leurs rêves pour un avenir meilleur. Ce faisant, ils nous dérangent et nous réveillent. Soixante-dix ans de paix, de confort, de bien-être nous ont-ils anesthésiés ? Or, l’esprit européen, c’est le mouvement et non pas une identité figée sur un passé immuable : « la mort de l’Europe c’est le passé qui perdure » dit Heinz Wismann, philosophe allemand (spécialiste des traditions) interviewé récemment sur France Inter. Construire l’Europe c’est un travail permanent d’amélioration, de transformation, d’accueil de l’autre dans sa diversité.
Nous sommes alors loin du « fun – easy – fast » attitude, mais appelés à travailler dans la lenteur, durement, et heureux (slow – hard – happy), en profondeur et dans le long terme.
Pourquoi une lettre sur les migrants, les exilés du Clunisois ? Parce que les exilés du Clunisois, ces « nouveaux habitants », nous invitent à retrouver l’esprit européen des pères fondateurs : ouvrir nos lieux cloisonnés, que nous croyons protégés, comprendre ces étrangers souvent si différents de nous par la couleur de peau, la langue, les habitudes. Ils nous enrichissent de leur présence dans nos villes et villages, nos écoles, nos entreprises, nos théâtres, nos associations. Ils nous mettent en marche pour changer nos regards, nos institutions et notre vivre ensemble.
Cette Lettre donne à lire un minimum de généralités et de chiffres sur les migrations. Nous avons préféré les témoignages d’exilés présentés au théâtre de Cluny par l’association Journées des écritures, et ceux des acteurs du Clunisois impliqués dans l’accueil et l’intégration des migrants venus « de l’au-delà de chez nous ».
Bonne lecture à la rencontre de ces « exilés » sur notre sol !
Philippe Mayaud