Lettre n° 15- Décembre 2024

Défendre la diplomatie

La vie est la vie, défendons-la !
Qu’avons-nous à défendre ? Au tout premier abord il réside en cette réflexion un paradoxe assez intrigant ; s’il paraît normal de se poser la question de ce qui est cher à nos yeux, il paraît tout aussi incohérent de ne pas savoir ce qui l’est. En effet, ce qui nous tient à cœur, ce que nous avons à protéger, nous l’avons aussi à l’esprit. Comment se battre pour un motif que l’on ignorerait ? Cela ne paraîtrait sensé dans le seul cas d’un schéma dictatorial où nos actions seraient dissociées de notre raison. Et en effet, cette hypothèse n’est pas si absurde puisque, bien souvent, nous flottons dans le courant de la pensée unique nous emmenant là où il le souhaite. Et cela par notre simple volonté de laisser les autres réfléchir à notre place. Ainsi, pour ne pas nous laisser gagner par la paresse de l’esprit, nous nous devons de savoir ce qui est à sauvegarder de ce monde et de choisir ce que nous voulons éphémère ou bien éternel.

Alors ma raison a demandé à mon cœur ce qu’il voulait défendre. Car s’il est vrai que c’est elle qui agit, c’est bien souvent le cœur qui choisit. Quant à lui, il s’est tourné vers ce qui le fait battre, ce qui le fait se battre. Et contrairement à ce que la raison pourrait penser, le cœur ne se défend pas, il défend. Il protège ce qui le lie, ce qui lui est substantiel, ce qui est vital. Je m’aperçois alors que tout ce qui compte se partage et doit être transmis et ne peut être gardé pour soi s’il ne veut pas être perdu.

Partant de ce constat, il est une infinité de choses que l’on peut défendre, car il est une infinité de choses que l’on peut offrir. Et s’il est bien un infini que nous connaissons un peu c’est la Vie. La Vie au sens le plus large possible du terme doit être préservée car c’est ce que nous avons de plus précieux, et tout ce que l’on voudra défendre s’y trouvera.
Et par un hasard merveilleux, je suis tombé sur ce poème de mère Teresa…

La vie est beauté, admire-la. La vie est félicité, profites-en. La vie est un rêve, réa- lise-le.
La vie est un défi, relève-le. La vie et un devoir, fais-le. La vie est un jeu, joue-le.
La vie est précieuse, soigne-la bien. La vie est richesse, conserve-la.
La vie est amour, jouis-en.
La vie est un mystère, pénètre-le. La vie est une promesse, tiens-la. La vie est tristesse, dépasse-la.
La vie est un hymne, chante-le. La vie est un combat, accepte-le.
La vie est une tragédie, lutte avec elle. La vie est une aventure, ose-la.
La vie est bonheur, mérite-le.
La vie est la vie, défends-la !

Pascal 45 Cl223 dit Léopold BLaise (ENSAM)

Dossier

Un point de vue venu du Royaume-Uni

« La guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens », disait Clausewitz. Je voudrais faire valoir que la diplomatie, qui est l’outil de la politique dans les affaires internationales, fait partie de notre défense et qu’elle est plus importante que jamais dans le monde dangereux d’aujourd’hui. Les diplomates n’ont pas toujours une excellente image. Le grand esprit Peter Ustinov a dit qu’un diplomate n’était « rien d’autre qu’un maître d’hôtel autorisé à s’asseoir de temps en temps ». Mais que font-ils vraiment ? Ayant moi-même été diplomate pendant 35 ans, mon rôle variait énormément en fonction des relations du Royaume-Uni avec le pays où j’étais en poste. Jeune femme au Laos, je me suis retrouvée secrétaire d’une conférence visant à désamorcer une guerre aujourd’hui oubliée. En tant qu’ambas- sadrice au Luxembourg au début des années 1990, mon travail a été entièrement façonné par notre adhésion commune à l’U.E. D’autres diplomates ont contribué à promouvoir le commerce britannique ou se sont occupés de sujets britanniques en difficulté. Au sens large, le rôle d’un diplomate est de défendre l’intérêt national en cherchant des moyens de maximiser les avantages communs et de désamorcer les problèmes préjudiciables. La guerre est l’échec ultime de la diplomatie. Pour prévenir la guerre, il est essentiel de maintenir les communications ouvertes, même lorsqu’il n’y a pas grand-chose à dire. Pour dire les choses crûment, le dialogue est préférable à la guerre (jaw/ jaw is better than war/war). La défense occidentale repose sur des idées et sur la dissuasion. Nous avons besoin de force militaire, mais aussi de « soft power ».
Il est largement reconnu que les budgets de défense européens doivent augmenter. La guerre en Ukraine l’a illustré très clairement. Nous ne pouvons pas non plus ignorer les signes indiquant que les États-Unis sont de moins en moins disposés à assumer une part aussi importante des coûts. (J’écris juste avant les élections américaines, mais cela restera vrai quel que soit le vainqueur). Le président Macron a pris l’initiative d’appeler à une défense européenne plus intégrée. Depuis la Seconde Guerre mondiale, la Grande-Bretagne a joué un rôle majeur dans la défense européenne commune (en particulier par le biais de l’OTAN) et continuera à le faire. Dans son premier budget, le gouvernement travailliste a augmenté les dépenses de défense et s’est engagé à continuer à soutenir l’Ukraine. Je suis ravie de dire que le BBC World Service, un élément important de notre « soft power », a également reçu un coup de pouce, mais pas le service diplomatique lui-même, qui a été réduit pendant des années. Pourtant, la diplomatie est une forme de défense bon marché.
La Grande-Bretagne et la France sont parmi les rares pays de taille moyenne à avoir une politique étrangère de portée mondiale. C’est bien sûr l’héritage de l’histoire (tout comme nos sièges au Conseil de sécurité des Nations unies). Certains affirment qu’un service extérieur mondial est un luxe et que nous n’avons plus besoin d’une telle portée. Mais je pense que ce serait une grave erreur pour la Grande-Bretagne de se débarrasser d’un atout majeur dont le pays a plus que jamais besoin maintenant qu’il a quitté l’U.E. Ce serait également une abdication de responsabilité.
La diplomatie est en première ligne dans un monde instable et doit elle-même être défendue.

Juliet Campbell — ancien ambassadeur britannique au Luxembourg